Elle vous guette sournoisement dans les voies que vous préférez, là où vous vous sentez bien en sécurité. La corrosion sous contrainte frappe en plein jour, de manière invisible et imprévisible. Mais l’espoir subsiste… l’UIAA a de précieux conseils à vous donner. Ne les ratez pas!
En bref
De récents incidents ont eu pour cause la rupture inattendue d’ancrages d’escalade sous faible charge – après seulement quelques mois/années d’installation. Ces ruptures, qui se produisent principalement avec des ancrages en acier inoxydable (!), sont dues à des dégradations environnementales, principalement la corrosion et plus spécifiquement la corrosion sous contrainte (CSC), appelée aussi corrosion sous tension.
- Dans le pire des cas, les ancrages peuvent se casser avec une charge de quelques dizaines de kg seulement – moins que le poids d’un grimpeur
- Habituellement situé en bord de mer mais cela peut aussi être à quelques kilomètres des côtes.
- Cette corrosion n’est pas toujours visible: ce peut être des fissures invisibles à l’œil nu
- La corrosion sous contrainte, qui est la plus agressive, peut initier des fissures très rapidement après l’installation de l’ancrage: quelques semaines peut-être, quelques mois sûrement
- Toutes les nuances d’aciers inoxydables sont concernées, même le 316
- Tout équipement en place doit être considéré comme potentiellement affecté
Facteurs critiques
- Site avec une humidité relative « modérée » (OK si c’est très sec ou très humide, c’est entre- deux qu’est le problème)
- Les endroits NON lavés par la pluie (meme par de l’eau de mer peut être ok)
- La température n’est pas un critère: la CSC peut se produire à 20°C, mais des températures plus élevées sont pires
- Types de rocher: calcaire/dolomite: généralement pire que le grès ou le granite (le karst est le pire)
La corrosion sous contrainte (CSC) a été confirmée en tant que cause d’un nombre non négligeable de ruptures d’ancrages dans des voies d’escalade et est également suspectée dans beaucoup d’autres cas.
De petites différences dans les microclimats peuvent induire une corrosion sous contrainte pour certains ancrages, alors que d’autres situés dans la même voie ou la même falaise ne sont pas atteints.
Cette corrosion CSC est souvent associée avec l’escalade en bord de mer, mais elle peut aussi se produire à l’intérieur des terres où des éléments corrosifs sont présents, soit provenant de la roche elle-même, soit déposés par les vents provenant des côtes.
Quelques endroits où la présence de corrosion sous contrainte a été confirmée (ou bien est fortement suspectée): Thailand; Greece; Taiwan; Italy; Dominican Republic; Malta; Cayman Brac; Minorca; Hawaii; Morocco; Madagascar; Portugal; Sardinia; … il n’y en a probablement beaucoup d’autres, alors restez prudents!
Que faire en tant que grimpeur?
Seuls des tests destructifs peuvent confirmer ou infirmer la présence de CSC sur des ancrages en place. Il n’est pas possible de vérifier visuellement ou par des tests simples (par exemple en tirant dessus) la résistance des ancrages installés. Même des ancrages installés depuis quelques mois seulement ou qui paraissent flambant neufs peuvent être fragilisés par de la CSC ou d’autres formes de corrosion.
Des tests effectués par Petzl France sur tous les ancrages d’une falaise ont montré que 20% des ancrages en place avaient une résistance entre 1 et 5 kN et n’auraient donc pas vraiment pu supporter le poids d’un grimpeur et encore moins arrêter une chute. De telles conditions provoquent des incidents comme celui qui est arrivé récemment en Sicile: durant un rappel, la vis de l’ancrage inférieur du relais s’est rompue sous le poids du grimpeur (65 kg). Heureusement, l’ancrage du haut a tenu et les trois grimpeurs sont indemnes.
Recommendations Clé
Lors de la planification
- Pensez à la CSC lors de l’évaluation des risques à grimper dans la région
- Contrôler auprès des grimpeurs locaux et/ou des associations d’escalade la présence de corrosion et CSC dans la région, et la résistance à la corrosion des ancrages posés.
- Soyez préparé à la présence de CSC, particulièrement aux endroits chauds, en bord de mer avec du calcaire ou de la dolomite (le karst est la roche la plus agressive).
Quand vous grimpez
- Pensez à la CSC lors de l’évaluation des risques et du choix de la voie.
- Posez les moulinettes, relais et rappels sur des relais à plusieurs ancrages
- Sécurisez les ancrages et relais avec des coinceurs, friends, arbres, etc…
- Soyez préparé à renoncer en cas d’ancrage suspect
Dans le cas d’une situation suspecte ou rupture d’ancrage (une fois les grimpeurs en sécurité)
- Collectez les parties de l’ancrage concerné; évitez de toucher les surfaces de rupture ou d’essayer de remettre les morceaux ensemble.
- Informez la communauté des grimpeurs locaux. Partagez une observation sur MountaiNow pour géolocaliser la rupture et informer la communauté globale en temps-réel
- Contactez l’UIAA et faitesnous parvenir l’ancrage concerné pour analyse
Adapté de « Regarde ou tu clippes! Ruptures d’ancrages d’escalade dues à la corrosion sous contrainte »; voir l’article complet ici. Copyrights – images exceptées – UNION INTERNATIONALE DES ASSOCIATIONS D’ALPINISME